C’est la scène classique du réveillon. Vous arrivez dans l'entrée bondée, les manteaux s'empilent, et soudain, une tante ou un grand-oncle que votre enfant n'a pas vu depuis un an se penche vers lui : "Alors, tu me fais un gros bisou ?". Votre enfant se fige, recule. Gêné, vous lâchez la phrase fatidique : "Allez, sois gentil, fais un bisou".
Stop. Si cette injonction part d'une bonne intention (la politesse, faire plaisir), les spécialistes de l'enfance et de l'éducation positive sont formels : forcer un contact physique est une erreur éducative majeure aux conséquences insoupçonnées.
Voici pourquoi, ce Noël, vous devriez défendre le droit de votre enfant à dire "non".
1. La politesse n'est pas une dette physique
Nous confondons souvent "affection" et "politesse".
Le bisou ou le câlin sont des marques d'affection. La politesse, c'est dire bonjour, merci, au revoir. On peut être parfaitement poli sans avoir de contact physique.
En forçant le bisou, nous apprenons à l'enfant que pour être "gentil" ou "poli", il doit sacrifier son confort personnel. Nous lui enseignons que le désir de l'adulte (recevoir un bisou) est plus important que son propre ressenti (ne pas avoir envie d'être touché).
2. La leçon cruciale du consentement
C'est le cœur du problème. Dans les pédagogies respectueuses comme Montessori, l'autonomie de l'enfant est centrale. Cela inclut l'autonomie corporelle.
Son corps lui appartient. Il est le seul à décider qui a le droit de le toucher et quand. C'est une base fondamentale pour sa sécurité future.
Si nous forçons un enfant de 4 ans à embrasser un oncle "pour faire plaisir", comment espérer qu'à 15 ans, il ou elle sache dire "non" fermement à un contact non désiré ?
L'apprentissage du consentement commence dès le plus jeune âge, dans le cercle familial. Lui apprendre que son "non" est respecté par les gens qui l'aiment est le plus beau cadeau que vous puissiez lui faire.
3. Le chantage affectif : "Tu n'aimes pas Mamie ?"
C'est souvent la phrase qui suit le refus de l'enfant. C'est une forme de manipulation émotionnelle, souvent involontaire de la part des proches.
Un enfant peut aimer profondément ses grands-parents et ne pas avoir envie de contact physique à l'instant T. Peut-être est-il timide, fatigué par le voyage, ou simplement impressionné par le monde. Refuser un bisou n'est pas un rejet de la personne, c'est l'expression d'un besoin immédiat de distance.
4. Les solutions : Comment gérer le "malaise" au réveillon ?
Vous êtes convaincu, mais vous appréhendez la réaction de la famille ? C'est normal. Votre rôle de parent est de faire tampon. Vous devez être le garant de la sécurité émotionnelle de votre enfant, quitte à froisser légèrement l'ego d'un adulte.
Voici comment préparer le terrain :
Les 3 alternatives polies au bisou forcé
Avant d'arriver, prévenez votre enfant : "Tu n'es jamais obligé de faire des bisous. Si tu ne veux pas, tu peux dire bonjour autrement." Proposez-lui des options :
- Le "Check" ou le "High-Five" : C'est ludique, rapide et moins intrusif.
- Le coucou de la main : Parfait pour les enfants timides qui ont besoin d'observer de loin avant de s'approcher.
- La phrase magique (pour le parent) : Si la famille insiste, intervenez calmement : "Il n'a pas envie de faire de bisou pour l'instant, il vous dira bonjour à sa façon quand il sera prêt."
Ce Noël, offrez à votre enfant le respect de son intégrité. C'est une leçon qui lui servira toute sa vie, bien après que les décorations du sapin aient été rangées.